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Chapitre 46 : Un voyage attendu

Pour renforcer les relations familiales, et notamment la relation entre Lucas et Angélique, je décidais d'organiser un long weekend à Granite Falls. Après tout, la dernière fois j'étais bien revenue enceinte ou presque, la méthode n'était donc pas trop mauvaise.


Et cela ne tarda pas à marcher. En effet, toute cette verdure plut beaucoup à Angélique qui laissa éclater son côté enthousiaste et fofolle au point de faire un concours de grimaces avec son père.


Elle se révéla également être une aventurière en herbe, toujours prête à mettre sa main dans un vieux tronc pour en sortir une grenouille gluante.


Pour ma part, je repris ma guitare. Les années avaient passé et mes doigts étaient sacrément rouillés, mais je réussis à sortir quelques mélodies. Mais ma soeur se mit rapidement à devenir jaune fluo d'embarras, alors je dus me résoudre à abandonner l'idée de conquérir un jour un public. Et à abandonner la guitare par la même occasion.


Rose fit connaissance avec la nouvelle garde-chasse, puisqu'elle risquait d'être sa seule compagnie dans les années à venir.


Mais le flot de paroles de ma fille lassa bien vite la brave femme, et par dépit Rose alla retrouver son père qui était en train de pêcher pour oublier qu'il avait perdu le concours de grimaces.


Heureusement, Lucas semblait avoir retenu mon sermon et Angélique ne fut pas pour autant délaissée. Bien au contraire, il lui consacra une bonne partie de la soirée.


Le deuxième jour, lors de la balade en forêt, Angélique confirma son côté casse-cou en se lançant dans une chasse aux insectes. Beurk, prendre des cafards dans les mains, très peu pour moi !


Rose mit en pratique son apprentissage de l'herboristerie et repéra plusieurs buissons de plantes comestibles et non-comestibles.


Lucas emmena son héritière dans la clairière où sa chaumière était construite, afin de faire les dernières recommandations à Rose. "Alors pour les pommes de terre en robe des champs, il te faut :

- 4 pommes de terre de taille moyenne

- de la moutarde

- de la crème fraîche épaisse

- de la ciboulette épaisse


Tu laves tes pommes de terre, tu les places sur ton grill, et tu les fais cuire en vérifiant la cuisson avec un couteau. Pendant ce temps, tu mélanges la moutarde et la crème. Une fois que tes pommes de terre sont cuites, tu les mets sur une assiette, tu les coupes en quatre et tu mets deux cuillères à café de sauce sur chaque. Tu finis en ajoutant la ciboulette finement hachée."


Ce soir-là au coin du feu, Angélique nous gratifia d'un récit de fantômes à faire froid dans le dos. Dans la nuit Zira vint me réveiller en me disant qu'elle avait vu une lampe bouger. Je lui ai répondu que ça n'était que des hallucinations, tout en me promettant de l'envoyer chez un psy, on ne sait jamais.


Au dîner, voyant Rose revenir seule de la clairière profonde, je lui demandais :

"Et ton père, il est où ?

- Il a prévu de dormir là-bas, en souvenir du bon vieux temps ou quelque chose dans le genre."


Comme le troisième et dernier jour du wekend à midi, Lucas n'était toujours pas rentré, je me décidais à aller le voir. Je le trouvais assis pensivement devant un feu. Cette vision me rappela notre première rencontre ainsi notre première nuit ensemble, et je me rendis compte que bien des années s'étaient écoulées depuis ce moment.


"Je me doutais bien que je te trouverais ici. Nostalgique ?

- Un peu, oui. Cette clairière et cette maison, c'est mon environnement naturel. Et ça me manque d'être ici.

- Mais maintenant ton environnement, c'est aussi le manoir, avec moi et les filles, non ?

- Je sais, je sais... Mais je regrette parfois ma vie d'ermite au contact de la nature."


J'inspirais profondément, sachant que les mots qui allaient sortir de ma bouche seraient décisifs.

"Et si je te proposais une voie de sortie ?

- Comment ça ?

- Si là maintenant, je t'offrais la possibilité de rester ici. Après tout, tu as ton héritière, j'ai la mienne, les filles sont grandes, plus rien ne te retient vraiment au manoir. Si tu pouvais retrouver ta vie d'avant, tu le ferais ?


- Arf, Sara, ça n'est pas aussi simple...

- Si, ça l'est ! On n'est pas obligés de s'embarrasser avec un divorce, et avec Zira on saura veiller sur les filles ! Alors je t'offre une voie de sortie, une chance de reconsidérer ton choix et de rester ici.


Il resta un moment silencieux, avant de dire :

"Je t'aime Sara, vraiment. Mais cette vie là-bas, dans cette grande maison, aussi entouré, ça ne me convient pas. J'ai essayé, je te le promets, j'ai tout essayé pour rentrer dans le moule, pour être le parfait époux et le parfait père. Mais je n'y arrive pas, ça n'est pas la vie que j'ai voulue. Alors... je vais rester ici."


Je pus à peine articuler un "d'accord", et nous échangeâmes notre dernière étreinte. Puis quand j'eus la force nécessaire pour me dégager, je partis en courant de la clairière, sans me retourner, laissant derrière moi l'amour de ma vie.


J'errais seule dans la forêt un bon moment, avant de rentrer à notre logement. Voyant que le soir était déjà bien entamé, je criais en arrivant "les filles ! C'est l'heure de partir !"


Rose fut la première sortie, et me voyant seule, me demanda :

"Ben ? Il est où papa ?

- ...

- Ok, j'ai compris..."

Elle prit doucement dans ses bras, et au contact de ma fille je me mis à pleurer toutes les larmes de mon corps.


Cette nuit-là, comme beaucoup de nuits suivantes, je n'eus pas le courage de dormir seule dans le lit conjugal. Je me réfugiais donc dans le lit de ma soeur, accompagnée par ma petite Angélique.


On peut dire que les mois qui suivirent ne furent pas des plus joyeux. J'étais rongée par le chagrin de la séparation, et j'avais du mal à trouver de l'intérêt dans quoi que ce soit, même dans les bons plats que préparait Rose.


Rose faisait justement une héritière formidable. Pendant que je traversais ma période de blues, elle prit en main les affaires de la maison, allant des repas aux devoirs de sa petite soeur. Zira était également plus investie que jamais.


Angélique, dont le chagrin était atténué par sa nature profondément joyeuse, mettait tout son coeur à me faire rire, mais n'arrivait qu'à me faire décrocher quelques faibles sourires, même avec ses plus belles grimaces.


Pendant un temps, j'essayais de me donner à fond dans mon travail, mais même ça n'arrivait pas à me faire oublier que mon mari était dans une clairière au fond d'une forêt plutôt qu'à mes côtés.


Un peu de joie revint à l'approche de l'anniversaire d'Angélique. Comme j'avais complètement oublié l'évènement, ce fut Rose qui, comme à son habitude, se chargea de préparer le gâteau.


Voir mon bébé devenir une grande fille me fut sans doute le délic qui ramena un peu de joie de vivre en moi.


Mais mon sourire s'effaça rapidement en voyant mon bébé devenir un ado hippie au goût vestimentaire bien trop coloré.

Revenez bientôt
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